Calames

Fonds Dejerine-Klumpke (1859-1927)

Organisme responsable
Académie nationale de médecine. Bibliothèque

Description :
Ces archives sont constituées de correspondance administrative et privée, de cartes d’étudiante, d’une biographie, mais également d’un grand nombre de coupures de presse reflétant le débat au sujet de l’Internat féminin.
Pour classer les papiers personnels d’Augusta Dejerine-Klumpke – dont on peut établir les bornes à 1876 et 1889 –, il a suffi de suivre l’ordre des dossiers pré-établis, autrement dit l’ordre chronologique. Une première partie réunit les éléments biographiques ; une deuxième partie rend compte des premières années d’études à la Faculté de Médecine de Paris (1876-1881) ; une troisième partie concerne l’Externat (1881-1885) ; une quatrième partie relate les différentes étapes qui ont amené à l’admission à l’Internat (1884-1886) ; une cinquième partie s’attache au Cinquantenaire de l’Internat féminin (1937) ; enfin, une sixième partie comporte de la correspondance n’ayant trait ni à l’Externat ni à l’Internat, ainsi que des coupures de presse consacrées à la soutenance d’Augusta Déjerine-Klumpke en 1889.
Ces archives personnelles sont précieuses et méritent l'attention. Bien que concernant exclusivement le parcours d’Augusta Klumpke jusqu’à son entrée à l’Internat des Hôpitaux de Paris, rendent compte des aspirations d’une jeune femme voulant avant tout avoir le droit d’étudier, en dehors de toute autre considération et de la lutte menée pour que les femmes obtiennent l’autorisation de se présenter à ce concours jusque-là réservé aux hommes. Être la première femme reçue Interne des Hôpitaux de Paris est un exploit qui suscite légitimement la fierté. Mais au-delà de son histoire personnelle, le témoignage de Madame Déjerine-Klumpke rend sensible et vivant un moment important de l’histoire des femmes, des mentalités et des institutions médicales en France.
Conditionnement :
Boîte 1 : ADjK I à IV
Boîte 2/2 : ADjK V à VI
Biographie ou Histoire :
Augusta Dejerine-Klumpke est née le 15 octobre 1859, à San Francisco aux États-Unis. Son père, John Gérard Klumpke, né à Suttrup (Nouvelle-Orléans), est l’un des premiers « territorial pionneers » de San Francisco et y prospère comme homme d’affaires. Sa mère, Dorothea Matilda Tolle, née à New York, a suivi sa sœur venue s’installer à San Francisco et y rencontre John Gérard Klumpke. Ils se marient le 28 octobre 1855. Entre 1855 et 1866, naissent quatre filles ; Augusta est le deuxième enfant. À la suite de chutes malheureuses au cours des premières années de sa vie, la fille aînée des Klumpke devient infirme. Face à l’impuissance des médecins californiens, Madame Klumpke décide de partir avec ses enfants pour consulter le Professeur Nélaton à Paris et le Professeur Langenbeck à Berlin. L’enfant est traitée à Berlin pendant un an et demi, sans grand succès. Toute la famille retourne aux États-Unis et reprend sa vie prospère à San Francisco. À un enseignement scolaire sérieux, viennent se joindre des cours particuliers à domicile pour parfaire l’instruction des quatre filles. La famille s’agrandit encore de deux nouveaux membres, un garçon en 1868, et une fille en 1870. Après la naissance de son dernier enfant, Madame Klumpke demande la séparation et obtient la garde des enfants. Elle repart alors pour l’Europe en avril 1871. Elle trouve refuge chez une cousine à Göttingen, le temps de régler ses affaires, et s’installe successivement au bord du lac de Genève, au dessus de Clarens, puis à Lausanne. Elle met cette fois encore tout en œuvre pour donner la meilleure éducation à ses enfants – langues vivantes et anciennes, sciences, littérature et arts.
Augusta se destine d’abord à l’enseignement sans véritable vocation. Mais en 1875, à la veille de choisir ses études supérieures, elle apprend que Madeleine Brès vient de soutenir sa thèse de doctorat en médecine à la Faculté de Médecine de Paris. Augusta s’enthousiasme à l’idée d’entreprendre elle aussi ce parcours. Madame Klumpke décide de partir s’installer à Paris, ville à même de proposer un large éventail de formations de qualité pour ses enfants : la première, Anna Elisabeth, peut s’adonner à la peinture (où elle obtient plusieurs distinctions et se lie à Rosa Bonheur) ; la deuxième, Augusta, entreprend ses études de médecine. Les plus jeunes finissent leurs études secondaires, avant d’entamer des carrières brillantes : la troisième, Dorothée, devient la première femme à soutenir un doctorat de mathématiques en Sorbonne (en 1893) et se spécialise en astronomie ; la quatrième, Mathilda, étudie la musique et embrasse une carrière de pianiste aux États-Unis ; le cinquième, John William, fait la plus grande partie de sa scolarité à Louis-le-Grand et devient ingénieur ; enfin, la sixième, Julia, étudie le violon et part l’enseigner aux États-Unis. Madame Klumpke décède le 11 mai 1924, dans la maison de Rosa Bonheur à By près de Thomery en Seine-et-Marne.
Malgré les mises en garde du doyen de la Faculté Alfred Vulpian, Augusta Klumpke commence ses études de médecine à la Faculté de Paris en 1876, dès qu’elle obtient les équivalences au baccalauréat en lettres et au baccalauréat en sciences. Elle suit aussi des cours de sciences de la Sorbonne, les cours du Professeur Frémy au Muséum, du Professeur Joseph Auguste Fort, dans le Pavillon de l’Enseignement libre – où elle obtient la médaille de vermeil du Prix d’anatomie de l’Enseignement libre (1878-1879) –, et du Professeur Ranvier au Collège de France. Elle fait ses stages hospitaliers et suit les consultations : à la Pitié, des Docteurs Lancereaux, Gallard et Jaccoud, à Saint-Louis, du Dr. Terraillon, à Lariboisière, du Professeur Duplay, aux Quinze-Vingts, du Dr. Fieuzal. Elle suit également les leçons cliniques du Dr. Charcot à la Salpêtrière et celles du Dr. Magnan à Sainte-Anne.
Entre 1881 et 1882, elle est stagiaire dans le service de clinique médicale du Professeur Hardy à la Charité ; le Dr. Dejerine y est chef de clinique et le Dr. Landouzy, médecin des Hôpitaux et professeur agrégé. Elle s’initie alors au travail scientifique et se rend très utile pour les recherches bibliographiques grâce à sa maîtrise de plusieurs langues étrangères. En 1882, en stage à l’Hôpital Saint-Louis dans les services du Dr. Porak, puis du Professeur Grancher, elle passe une partie des épreuves du doctorat.
Grâce à la campagne menée par la condisciple d’Augusta, Blanche Edwards, qui multiplie les visites aux parlementaires et aux médecins pour requérir leur soutien, les femmes obtiennent enfin le droit de concourir à l’Externat des Hôpitaux de Paris. Les deux étudiantes préparent le concours grâce aux conférences des Docteurs Queyrat et Auguste Broca. Elles sont admises toutes les deux en 1882. Augusta Klumpke passe son Externat à l’Hôtel-Dieu d’abord dans le service du Dr. Empis. Elle complète en parallèle ses connaissances par les leçons cliniques du Dr. Charcot en neurologie, du Dr. Magnan en psychiatrie, du Professeur Germain Sée (à l’Hôtel-Dieu), du Professeur Alfred Fournier et des Docteurs Besnier et Lailler. Elle passe ensuite dans le service du Professeur Vulpian en médecine générale avec une consultation de neurologie. C’est dans ce cadre qu’Augusta Klumpke diagnostique chez un malade une paralysie radiculaire totale du plexus brachial avec troubles oculo-pupillaires, sur lequel elle publie un mémoire en 1885 dans la Revue de Médecine. Son mémoire est couronné par le prix Godard de l’Académie de Médecine, et ce type de maladie prend alors son nom.
Dès la première année d’Externat, Augusta Klumpke et Blanche Edwards suivent les conférences en vue de préparer l’Internat, sous la direction des Docteurs Queyrat, Colleville et Legendre. Blanche Edwards persévère dans ses démarches pour convaincre l’opinion médicale et politique sur la nécessité d’admettre les femmes à concourir à l’Internat. En réaction, les Internes se mobilisent pour leur en empêcher l’accès. Dans les deux camps, les pétitions circulent et la presse se passionne pour ce débat. Les Internes semblent l’emporter lorsque les conférences d’Internat sont fermées aux femmes au printemps 1885. Le Dr. Queyrat décide de continuer à enseigner malgré tout aux deux candidates potentielles. En août 1885, le Préfet de Police, sur ordre du Ministre de l’Instruction publique Paul Bert, favorable au mouvement d’émancipation des femmes, impose à la Faculté de Paris la candidature des femmes à l’Internat. Cette décision vient contrecarrer la décision prise par le Doyen de la Faculté, la Société Médicale des Hôpitaux, la Société des Chirurgiens des Hôpitaux de Paris, le Conseil de surveillance de l’Assistance publique et l’Association des Anciens Internes des Hôpitaux de Paris.
C’est ainsi que, contre l’avis de toute la classe médicale, et bénéficiant exclusivement de quelques soutiens individuels dans la profession, Augusta Klumpke et Blanche Edwards se présentent aux épreuves du concours le 7 octobre 1885. Pour des raisons de « fuite », le concours est cassé. Il est réorganisé le 19 octobre. Augusta Klumpke obtient la meilleure note de l’écrit (29/30), mais ne convainc pas le jury à l’oral. Elle est nommée 2e Interne Provisoire. Blanche Edwards échoue. Elles repassent le concours en 1886. Augusta Klumpke obtient de nouveau la meilleure note à l’écrit et, au terme de l’oral, est reçue 16e interne titulaire (sur 52) ; Blanche Edwards est reçue Interne provisoire.
En 1887, Augusta Klumpke fait sa première année d’Internat à l’Hôpital Lourcine (actuellement Hôpital Broca) dans le service du Dr. Balzer, et rejoint pour sa seconde année le service du Dr. Landouzy. En 1888, elle interrompt son Internat et épouse le Dr. Jules Déjerine. Elle se consacre alors à rédiger sa thèse de Doctorat, qu’elle passe brillamment en 1889, intitulée : Des polynévrites en général et des paralysies et atrophies saturnines en particulier. Étude clinique et anatomo-clinique. Sa thèse obtient la médaille d’argent de la Faculté de Paris et le prix Lallemand de l’Académie des Sciences.
Comme son sujet de thèse le laisse supposer, la suite du parcours d’Augusta Dejerine-Klumpke est centré sur la neurologie. N’ayant pas de poste officiel, elle poursuit ses recherches dans les hôpitaux où son mari exerce : d’abord à l’Hôpital de Bicêtre, puis à la Salpêtrière. Elle est la collaboratrice efficace de son mari ; leurs publications conjointes se multiplient avec les années, et font l’objet de communications et de comptes rendus à la Société de Biologie . Ils publient ensemble une somme en deux volumes, l’Anatomie des centres nerveux (1895-1901) ; et Augusta Dejerine-Klumpke participe encore à la Sémiologie des affections du système nerveux (1914), signé du seul nom de Jules Déjerine. Elle contribue aussi aux travaux présentés par les étudiants de Jules Déjerine , et plusieurs d’entre eux ont bénéficié de ses conseils éclairés pour rédiger leur thèse.
Pendant la Première Guerre Mondiale, Augusta Dejerine-Klumpke installe dans la Clinique de Charcot à la Salpêtrière le service des blessés militaires. Ses recherches concernant la moelle épinière et la topographie cérébrale s’intensifient devant l’ampleur des blessures des soldats à soulager. Après la mort de Jules Dejerine en 1917, la Direction du Service de Santé lui demande d’organiser le service des grands infirmes à l’Hôpital des Invalides, avec la collaboration d’anciens élèves de son mari. Elle y découvre et y étudie avec André Ceillier les paraostéo-arthropathies des grands paraplégiques. Nommée en 1913 chevalier de la Légion d’honneur par le Ministère de l’Instruction publique, son dévouement lui vaudra d’être nommée officier de la Légion d’honneur par le Ministère de la Guerre en 1921.
Fidèle à la mémoire de son mari, elle fait en sorte que les recherches et les collections d’anatomie du Dr. Jules Dejerine ne sombrent pas dans l’abandon et l’oubli. Elle décide alors de mettre en place un musée Déjerine en dotant la Faculté de Médecine pour y installer et y conserver ces collections ; elle crée également une fondaion à la Société de Neurologie pour aider aux recherches scientifiques, faisant de même à la Société de Neurologie suisse et à la Faculté de Médecine de Strasbourg.
Atteinte d’un cancer du sein, Augusta Déjerine-Klumpke décède le 5 novembre 1927. Elle laisse une fille unique, Yvonne, elle-même docteur en médecine, Interne des Hôpitaux de Paris, ayant épouse du Dr. Étienne Sorrel, chirurgien des Hôpitaux de Paris, et trois petits-enfants. L’aînée, Jacqueline, continuera la lignée des femmes médecins.
Provenance :
Augusta Dejerine-Klumpke elle-même est à l’origine de la constitution de ce fonds. En effet, c’est elle qui d’abord a conservé les journaux qui témoignent de la lutte menée contre les opposants à l’Internat féminin. Elle a sélectionné et quelquefois collé des coupures de presse dans un cahier. Elle a également rédigé sa biographie jusqu’à son mariage en 1888, et recopié elle-même des extraits de sa correspondance personnelle qui permettent de retracer les différentes étapes de son combat. Une fois le succès remporté, le témoignage et la compilation s’interrompent.
Modalités d'entrée dans la collection : Les papiers personnels d’Augusta Dejerine-Klumpke sont arrivés à l’Académie nationale de Médecine sans doute par donation de sa petite-fille Jacqueline Sorrel-Dejerine. En effet, le fonds tel qu’il a été légué comporte un certain nombre de notes manuscrites, dont l’auteur semble être Jacqueline Sorrel-Dejerine.
Documents en relation : L'inventaire peut être consulté en ligne, en format pdf.

Rappels sur les conditions d'accès et d'utilisation des documents : L'accès aux collections patrimoniales est soumise à une autorisation préalable, conditionnée par la justification d'une recherche.
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