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Académie nationale de médecine. Bibliothèque
Description :
Ces papiers correspondent en grande majorité à la fin des études de Chomel et au début de sa carrière au sein de l’Hôpital de la Charité, autrement dit à la période entre 1810 et 1817 environ. Ils présentent la particularité d’avoir été classés par Chomel lui-même : il s’agit à la fois de notes de cours et de notes de lecture concernant un nombre assez important de maladies.
Chomel semble avoir constitué différents grands ensembles : d’abord, des notes de cours assez générales et des notes de lecture prises pendant ses études sur des cahiers ; puis un ensemble de notes relatives à un grand nombre de maladies ; ensuite des notes préparatoires à ses cours et travaux : les notes accumulées pour rédiger sa thèse concernant le rhumatisme, celles relatives à son ouvrage intitulé Élémens de pathologie générale (Paris, 1817), celles au sujet des fièvres, qui ont fait l’objet à la fois de cours et d’un ouvrage intitulé Traité des fièvres et des maladies pestilentielles (Paris, 1821) ; enfin, des notes éparses plus tardives, notes de cours et de lecture, ainsi que des notes concernant les titres et travaux de certains médecins.
Le classement et l’inventaire du fonds suivent très largement ces grandes distinctions opérées par Chomel lui-même.
La première partie du fonds (Chomel 1, I, n ° 1 à Chomel 1, III, n° 10) réunit les notes de cours et de lecture prises pendant les études de Chomel. Elles semblent relever à la fois des études secondaires et des études à la Faculté de médecine. Il s’agit de cours consacrés à la chimie, la physique expérimentale, l’anatomie et la physiologie, de notes de révision, de récapitulations concernant certaines maladies, ou encore de tableaux anatomiques. On trouve également des observations de patients faites à l’hôpital de la Charité et à l’hospice de la Salpêtrière, consignées par le jeune étudiant sur des cahiers. Quant aux notes de lecture, elles concernent soit des ouvrages précis (d’Ambroise Paré, William Cullen ou Daniel Le Clerc), soit des thèmes particuliers comme la médecine légale ou l’hygiène, extraits d’ouvrages identifiables ou d’encyclopédies.
Dans la deuxième partie du fonds (Chomel 2, I à Chomel 6, II, n° 52), sont rassemblés des dossiers consacrés par Chomel à des maladies ou affections, classées par ordre alphabétique. Dans chaque chemise, sont regroupées des notes et des observations faites au lit des malades, de sorte à former à chaque fois un dossier complet. Les dossiers sont renseignés de manière inégale. Certains sont très fournis, d’autres très minces ; parfois ils sont constitués de notes nombreuses et de très peu d’observations de malades, parfois seules des observations viennent illustrer la maladie ou l’affection. La grande majorité des observations ont été faites à l’hôpital de la Charité entre 1811 et 1816 environ. Il arrive qu’aux observations faites par Chomel lui-même soient jointes d’autres observations effectuées par des confrères. Parmi les dossiers les plus volumineux, on relève les maladies produites par des corps étrangers et des agents délétères (Chomel 4, II, n° 29), les maladies pulmonaires (Chomel 4, II, n° 30), les névroses (Chomel 5, II, n° 32), ou encore les phlegmasies (Chomel 6, II, n° 38).
Dans la troisième partie du fonds (Chomel 7, I, A-n° 1 à Chomel 10, IV), sont classées les notes préparatoires aux ouvrages et aux cours de Chomel. Concernant cet ensemble de notes, deux caractéristiques générales sont à dégager. D’abord, d’un point de vue matériel, il est manifeste que Chomel recyclait à la fois le papier et les informations. En effet, aussi bien au sujet du rhumatisme que de la pathologie générale et des fièvres, on remarque des strates dans la constitution des dossiers. Les formats de papier, l’écriture, l’encre sont autant d’indices révélateurs que Chomel a réuni à la fois des notes prises lors de ses études (sur des feuilles grand format) qui livrent une présentation générale du sujet abordé, des notes de lecture compilées sans doute à des époques diverses – pendant ses études (sur des cahiers), mais aussi au début de sa carrière de praticien –, et des notes pour les cours qu’il a enseignés et pour les manuscrits des ouvrages qu’il a élaborés, semble-t-il, en parallèle. Pour ce dernier ensemble de notes, il est bien difficile de faire la part entre ces deux aspects de l’activité de Chomel. En effet, si les intitulés portés sur les dossiers renvoient visiblement à des cours, le contenu n’est pas toujours organisé de façon pédagogique. Ensuite, d’un point de vue méthodologique, on constate que Chomel suit systématiquement la même grille d’exposition des maladies : il en retrace l’histoire selon des catégories immuables.
Le premier ensemble de notes (Chomel 7, I, A-n° 1 à Chomel 7, I, E-n° 4) concerne la pathologie générale. Ce sujet semble avoir fait l’objet à la fois d’un cours et d’un ouvrage, les Élémens de pathologie générale (1817). Cet ouvrage à pure vocation didactique, destiné aux étudiants, se propose d’étudier la maladie d’une nouvelle manière, et pour ce faire, énonce une méthodologie : quittant les quatre divisions traditionnelles – nosologie, étiologie, séméiotique et symptomatologie –, il retrace « l’histoire complète » de la maladie. Ces dossiers ont été classés en respectant l’ordre indiqué par Chomel lui-même sur les chemises ou, à défaut, celui de son ouvrage.
Puis viennent les notes et observations consacrées au rhumatisme (Chomel 8, II, A-n° 1 à Chomel 8, II, B-n° 14). Chomel a proposé à deux reprises une analyse concernant le rhumatisme : il en a fait son sujet de thèse en 1813 – Essai sur le rhumatisme –, et il y revient ultérieurement dans le cadre de ses leçons de clinique. L’un de ses étudiants se charge alors d’éditer ce cours sous le titre : Leçons de clinique médicale faites à l’Hôtel-Dieu de Paris par le Professeur Chomel, t. II : Rhumatisme et goutte, recueillies et publiées par A. P. Requin, Paris, 1837 . Les notes et les observations sont abondantes. Les premières sont classées selon la méthode énoncée par Chomel dans sa pathologie générale, en reconstituant l’histoire de la maladie, de sa définition à la bibliographie qui la concerne. Quant aux observations, faites cette fois encore en majorité à l’hôpital de la Charité entre 1812 et 1815 (quelques-unes sont plus tardives), elles sont classées selon le diagnostic qu’elles portent en marge
Ensuite, a été traité de manière similaire l’ensemble des notes et des observations concernant les fièvres (Chomel 9, III, A-n° 1 à Chomel 10, III, B-n° 9). L’ordre des dossiers reprend celui de la table des matières de l’ouvrage de Chomel Des fièvres et des maladies pestilentielles (Paris, 1821). Les observations, faites cette fois encore à l’hôpital de la Charité entre 1812 et 1814, sont classées exactement comme précédemment selon le diagnostic, indiqué en marge de gauche.
Enfin, on trouve un manuscrit de 121 feuillets intitulé De l’inflammation en général (Chomel 10, IV). Il est de la main de Chomel mais ne comporte pas de nom d’auteur. Malgré nos recherches, ce texte reste non identifié. Comme Chomel se montre toujours très scrupuleux sur les références des ouvrages qu’il cite ou qu’il prend en notes, l’absence de nom d’auteur sur ce manuscrit peut laisser à penser qu’il s’agirait d’un inédit de Chomel.
Dans la quatrième partie du fonds (Chomel 11, I, A-n° 1 à Chomel 11, III, n° 2), sont regroupées des notes éparses apparemment plus tardives qui sont du même type que les précédentes : notes ayant servi à l’enseignement de Chomel (de 1819 et de 1823 ou 1828), notes de lecture et quelques observations lacunaires. Parmi ces notes, il faut signaler la présence de titres et travaux de médecins accompagnés d’annotations de Chomel relatives à des observations effectuées par ces mêmes médecins en 1831. Ces documents sont les seuls du fonds Chomel à faire référence à une quelconque activité institutionnelle. En effet, on peut penser qu’il s’agit de candidatures pour un poste, au jury duquel Chomel aurait participé.
Intérêt du fond
Le fonds Chomel à l’Académie Nationale de Médecine présente un intérêt multiple. D’abord, il intéressera le chercheur qui désire étudier l’œuvre d’Auguste-François Chomel. À ce premier niveau, les papiers de Chomel sont remarquables par leur homogénéité : il s’agit des notes de travail du jeune Chomel à l’aube de sa carrière brillante. Ils témoignent de son sérieux et de sa rigueur, de son assiduité au chevet des malades, de son effort constant pour enrichir sa culture médicale. Cette documentation unique permettra au chercheur de se faire une idée précise des années de formation de Chomel, de restituer le vrai visage du jeune étudiant, en donnant des éléments discriminants pour faire la part entre les témoignages concernant Chomel, entre l’hagiographie et la critique à la limite de la malveillance . En effet, si le Chomel théoricien n’a pas toujours convaincu ses contemporains ni les historiens de la médecine, un Chomel praticien hospitalier qui met son savoir au service des malades et des étudiants en médecine apparaît très clairement dans ses papiers : on compte 872 observations de malades. Par là, il manifeste pleinement son appartenance au courant de l’anatomie pathologique, dont les tenants à l’époque étaient G.-L. Bayle, l’un de ses maîtres, ou encore Laënnec. Parmi les notes de lecture de Chomel, le nom le plus récurrent est celui de Giovanni Battista Morgagni, grand inspirateur de cette pensée clinique. Mais les notes témoignent également de la curiosité de Chomel pour l’histoire de la médecine : il accumule une documentation fournie autour des maladies, mêlant les écoles, les méthodes et les époques. On relève en effet les noms d’Hippocrate, de Galien, d’Arétée de Cappadoce, aussi bien que ceux de nosologues ou physiologues. Chomel s’avère un connaisseur de la médecine des XVIIe et XVIIIe siècles, et pour ses propres travaux, il ne néglige aucune piste bibliographique. Ses archives prouvent également son intérêt pour les recherches de ses contemporains ; il fut prompt à tester la méthode statistique (au sujet du rhumatisme) et à diversifier les moyens thérapeutiques. Joindre aux observations des notes de lecture nombreuses, c’est en cela que consiste sa méthode de travail
Au-delà de l’étude concernant Chomel lui-même, le fonds détenu par l’Académie de Médecine propose un instantané des connaissances d’un jeune médecin, autour des années 1810-1815 à Paris. Les papiers de Chomel se situent à une période de transition entre les différentes conceptions médicales : au carrefour des nosologies classificatrices (avec William Cullen, très présent parmi les auteurs pris en notes par Chomel, ou Philippe Pinel dont Chomel reprend la classification concernant les névroses ), de l’anatomie pathologique, et de la médecine moderne telle qu’elle va se fixer grâce au débat houleux autour des fièvres. Chomel s’est intéressé à trois reprises à ce sujet : en 1820, puis en 1821, où il s’oppose aux conceptions de Broussais (et par la suite de J.-B. Bouillaud) ; enfin en 1834, où il infléchit son attitude grâce à l’influence du Dr. Louis et publie un ouvrage spécifiquement consacré à la fièvre typhoïde. Les papiers d’Auguste-François Chomel se placent donc au cœur des discussions de son époque, et en ce sens, ils sont un témoignage précieux pour les historiens.
Biographie ou Histoire :
Auguste-François Chomel naît le 13 avril 1788 à Paris, rue des Tournelles. Il est le fils de Antoine-Angélique Chomel et de Marie Barbe Jaminet. Auguste-François Chomel appartient à une illustre dynastie médicale. En effet, la famille compte dans les générations antérieures cinq médecins réputés, dont trois médecins du Roi de France : Jean-Baptiste Chomel (1639-1720), arrière-grand-père d’Auguste-François, Pierre-Jean-Baptiste Chomel (1671-1740), son grand-père (également doyen de la Faculté de médecine de Paris et membre de l’Académie des sciences), et Jean-Baptiste-Louis Chomel (1709-1765), son oncle (également doyen de l’Académie de médecine de Paris). Antoine-Angélique Chomel, le père d’Auguste-François, sourd de naissance, n’a pu reprendre le flambeau. Parmi ses trois fils, la carrière médicale fut refusée à Antoine souffrant du même handicap que son père ; quant à Jean-Auguste, grandi sous le Directoire, il a renoncé aux études après son service militaire, pour devenir agent de change à Paris. Il incombait donc à Auguste-François, troisième et dernier enfant, de perpétuer la tradition familiale, malgré une répugnance préalable pour l’anatomie.
Pour ses études secondaires, il est confié à l’institution Savouré à Paris, et poursuit son parcours au Lycée Napoléon où il obtient plusieurs prix au Concours général. À la Faculté de médecine de Paris, ses maîtres sont le baron Jean-Nicolas Corvisart des Marets, Gaspard-Laurent Bayle, Alexis Boyer et Philippe Pinel. Auguste-François Chomel est reçu parmi les premiers au concours d’interne des hôpitaux. Ses études sont sérieuses, méritent à plusieurs reprises des distinctions, et s’achèvent le 10 juin 1813 par le grade de docteur en médecine. Aussitôt, il entreprend une carrière de praticien hospitalier au côté de son maître Bayle : il est d’abord nommé en 1814 chef des internes attaché au service de l’Hôpital de la Charité, puis médecin résidant. Il demeure dans cet hôpital jusqu’en 1823. Parallèlement à la pratique de la médecine, Chomel manifeste très vite le souci de transmettre ses connaissances. C’est pourquoi il ouvre dès 1816 un cours de pathologie interne à la Charité.
La réputation et les qualités d’enseignant d’Auguste-François Chomel lui valent sans doute d’être nommé en 1823 agrégé en exercice à la Faculté de Médecine sans passer le concours. Il seconde le professeur Fouquier à la chaire de Clinique. L’ascension professionnelle de Chomel est remarquable. En 1827, il prend la succession très convoitée de Laënnec (mort prématurément à 45 ans) à la chaire de Clinique médicale de la Charité ; il est nommé en parallèle médecin honoraire de cet hôpital. En 1830, Chomel remplace Récamier (démissionnaire) à la chaire de Clinique de l’Hôtel-Dieu. Les honneurs se succèdent : élu d’abord membre associé en 1823 à l’Académie de Médecine, il en devient membre titulaire en 1826 au fauteuil de Royer-Collard ; nommé médecin consultant du Roi en 1832, en 1837, il est médecin honoraire de la Duchesse d’Orléans ; distingué par le Ministère de l’Instruction publique, il est d’abord membre du Conseil Académique de Paris en 1845, et en 1846, Conseiller ordinaire de l’Université (en remplacement de J.-B. Bouillaud, démissionnaire). En 1830, Auguste-François Chomel est fait chevalier de la Légion d’honneur, en 1837, officier de la Légion d’honneur, enfin, en 1843, officier de l’Ordre de Léopold de Belgique.
Cette carrière très brillante, Chomel décide lui-même d’y mettre fin. Par le décret du 8 mars 1852, les membres de l’Université doivent prêter serment de fidélité au nouvel Empereur. En raison de sa fidélité à la famille royale, François-Auguste Chomel est le seul professeur à refuser de prêter serment. Il quitte alors sa chaire.
Retiré de la vie publique, des épreuves familiales frappent Chomel. Il avait épousé le 20 décembre 1819 Madeleine-Euphrasie Jouet, fille de Jacques Jouet, négociant, et d’Adélaïde Picart-Duban. De cette union Chomel avait eu quatre filles. La deuxième fille mourut à l’âge de dix ans. En l’espace de deux ans, Chomel et son épouse enterrent deux autres de leurs filles. En 1856, Auguste-François Chomel tombe malade ; il décède le 9 avril 1858 dans son château de Morsang. Il laisse derrière lui sa veuve, la seule fille qui lui reste et des petits-enfants.
Modalités d'entrée dans la collection :
Les papiers d’Auguste-François Chomel en possession de l’Académie Nationale de Médecine ont vraisemblablement été légués dans le courant du XIXème siècle par sa famille à l’Académie dont il était membre.
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